La Chartreuse de POMIER

Balade no 4 : La Chartreuse de Pomier   (version détaillée)(i)

Le mercredi 7 octobre deux bonnes douzaines de seniors et de membres de la Mémoire de Bardonnex se sont retrouvés par une belle après-midi d’automne sur le parking de l’Auberge communale de Compesières. Ils se répartirent alors dans un nombre réduit de véhicules pour se rendre à la Chartreuse de Pomier, située sur le flanc du Salève, non loin de Présilly. Là, ils furent rejoints par 6 autres communiers venus séparément.

Nous sommes accueillis par Madame Véronique Jacquet-Francillon, qui nous présente ce site remarquable, voué pendant des siècles à la prière et à la méditation, puis elle nous invite à visiter les salles capitulaires du rez-de-chaussée et les caves médiévales. Elle retrace alors l’histoire de la Chartreuse à l’aide de diapositives.

L’ordre des Chartreux a été créé par Saint Bruno qui fit construire, dès 1085, une église et un monastère dans un lieu solitaire et sauvage du massif de la Chartreuse (Isère).

L’ordre, au fur et à mesure qu’il se développe, fonde de nouvelles chartreuses. La Chartreuse Notre Dame de Pomier a vu le jour  en 1170 grâce à une donation de Guillaume 1er, comte de Genève et de Vaud, complétée à plusieurs reprises par ses enfants, Humbert et Guillaume II.

La Chartreuse de Pomier comprenait à l’intérieur de ses murs de nombreux bâtiments, aujourd’hui disparus, notamment l’église Notre Dame de Pomier, 3 chapelles et les 12 cellules des chartreux entourant le grand cloître où étaient enterrés les chartreux ainsi que plusieurs Comtes de Genève et de Vaud.
Pendant plus 600 ans, de 1170 à 1793, 92 prieurs se succédèrent. Elle recevra d’illustres visiteurs, notamment les Empereurs Sigismond et Charles VI qui place le monastère sous la protection du Saint Empire germanique (1366).

Au début du XVIe siècle, la Chartreuse était devenue très prospère.
Outre le mas de Pomier, elle exploitait sur Présilly  plusieurs propriétés, notamment le domaine de Micairne (sur lequel se trouve actuellement la Maison du Salève), des bois, des vergers, des moulins et des vignes sur Neydens et Feigères. Ses possessions s’étendaient en direction de Jussy et Beaumont ainsi que sur les versants est  et sud du Salève (prés et pâturages au Sappey, à l’Abergement). Elle avait en outre des moulins dans la ville de Genève et des fermes importantes dans le pays de Vaud. La Chartreuse faisait cultiver la plupart de ces terres par des fermiers, des grangers ou des métayers.

Cette situation florissante se gâte quand, en 1504, Charles III succède à son frère à la tête du duché de Savoie. En lutte avec Genève, le duc tente de réduire la ville en paralysant son approvisionnement.

En 1535, Genève embrasse la Réforme et les Bernois viennent délivrer la ville de la pression du duc de Savoie. Ils s’emparent de territoires importants, notamment des villages des baillages de Ternier, de Gex, de Gaillard et du Chablais. En revanche, la Chartreuse de Pomier fut sauvée par la prudente politique de Charlotte de Genevois-Nemours qui était à la tête du Comté de Genevois, qui avait continué à ravitailler Genève pendant le blocus exercé par Charles III. Cela signifie que, dans la paroisse de Beaumont, la partie des possessions de Pomier qui dépendait du baillage de Ternier passa sous la domination bernoise et devint protestante, alors que Jussy et le Châble, rattachés au Comté du Genevois demeurèrent catholiques. Bien que limitrophe du territoire occupé par les Bernois, Pomier n’en faisait donc pas partie.

A la fin du XVIIIe siècle, neuf religieux-prêtres occupent le mas de Pomier. Il y a également un frère, sorte de factotum qui a sous sa direction 35 domestiques. Les vastes domaines de la Chartreuse - 750 hectares -s’étendent sur 9 communes dont plus de la moitié sur celle de Présilly.

A la Révolution (1793), la Chartreuse est saccagée, les livres et manuscrits de la très riche bibliothèque brûlés et ses biens vendus aux enchères. Pendant près de 100 ans, la Chartreuse sera pratiquement abandonnée et ses nombreux bâtiments démolis.

En 1894, la Chartreuse est rachetée par Jérémie Girod de Beaumont, créateur de la tomme de Beaumont. Ce dernier sauve le bâtiment principal de la ruine et aménage dans ses murs un  hôtel restaurant réputé. L’établissement fonctionne jusqu’en 1991.

En 2001, Claude Girod, arrière-petit-fils de Jérémie, procède à une rénovation et aménage ces lieux historiques pour accueillir des réceptions, des mariages, des séminaires, des expositions ou des concerts.
Après l’exposé, notre hôtesse nous offre un rafraîchissement dans la salle Saint Bruno. Nous la remercions de nous avoir livrés quelques-uns des secrets de ces lieux chargés d’histoire et nous prenons congé. Cependant, certains d’entre nous s’attardent dans le par cet sur les terrasses qui dominent Présilly. D’autres amorcent déjà le chemin du retour en traversant à pied la forêt domaniale aux arbres séculaires, témoins discrets du passage des pèlerins se rendant à Compostelle.

(i) Compesières n’eut pas la même chance. La Commanderie fut pillée et occupée par les Bernois.
(i) Texte établi à partir de l’exposé de Véronique Jacquet, des informations du site internet chartreuse-de-pomier.fr et du livre d’Abel Jacquet « Sur le versant du Salève. La Chartreuse de Pomier » Académie Salésienne T.89 Annecy 1980.
(ii) A mi-parcours, se trouve une statue de pèlerin en métal du sculpteur Jo Brand, décédé récemment et dont les cendres ont été répandue derrière la sculpture.
Emilien Grivel